dimanche 23 octobre 2011

L’après Kadhafi


La révolution libyenne a débuté le 17 février dernier. Depuis, Kadhafi avait usé de mercenaires et de forces de répression afin de faire taire les voix qui huaient contre son système caduque. 

C’est alors que l’OTAN est intervenue dans des conditions suspectes et les bras droits de Kadhafi se sont retrouvés par magie dans le conseil national de transition, le fameux CNT. Ville après ville et grâce à l’aide des bombardiers  français, Tripoli était enfin tombée entre les mains des révolutionnaires. Les vidéos du QG du guide libyen ont parcouru la toile et les médias à travers le monde entier.

                La ville natale du colonel a résisté, de durs combats on été menés à Syrte durant un mois entre les révolutionnaires et les derniers disciples de Kadhafi. Grâce à l’aide fournie par les bombardements et au soutien de l’OTAN, le tyran libyen a pu enfin être arrêté. Une fin révolutionnaire heureuse me diriez-vous, mais ce n’était pas le cas …

                L’arrestation du despote libyen a été l’événement phare du jeudi dernier, on nous a exposé un Kadhafi blessé et saignant, un Kadhafi suppliant les révolutionnaires qui jubilaient autour de lui en dansant, chantant et criant victoire. Une heure après, on nous annonce le décès du «  roi des rois de l’Afrique » dans des circonstances plus que confuses. La piste de la vindicte révolutionnaire parait de loin la plus plausible.

                Nul doute ne figure sur le fait que Kadhafi était un dictateur ayant usé de la répression sauvage et meurtrière vis-à-vis de son peuple, nul doute ne plane aussi sur l’illégitimité de son règne qui a duré quarante deux années pendant lesquelles il a dilapidé des fortunes émanant du pétrole libyen afin de satisfaire les caprices du clan Kadhafi, caprices qui viraient souvent dans la mégalomanie. Cependant, pour établir la justice, Kadhafi devait être jugé devant la cour pénale internationale qui avait émis d’ailleurs un mandat d’arrêt contre lui.

                Au lieu de cela, on a assisté à une vengeance pure et simple. Certains me reprocheront d’être utopique, de se positionner en donneur de leçons et de ne pas comprendre la situation. Je leur aurai donné raison si Kadhafi a été tué et enterré de suite. Mais son corps a été mutilé à tort et à travers, des révolutionnaires venaient de tous les coins pour se prendre une photo-souvenir avec le cadavre du défunt. Et le pire c’est que cette mascarade a duré presque quatre jours où l’on a exposé son corps. À ce qu’il parait, on a oublié dans la foulée des festivités que Kadhafi était un être humain avant tout et que sa dépouille méritait un respect dicté par les principes universels inébranlables. Et ce, indépendamment des horribles actes qu’il avait commis durant son règne.

                C’est pour ces raisons que je blâme la révolution libyenne qui aurait pu éviter ce dérapage éthique. Cela aurait démontré que la Libye entamait sa transition démocratique plus sereinement au lieu de cumuler les doutes sur un CNT suspect et une aide étrangère conditionnée pour des barils de pétrole à foison.

                La page Kadhafi est dorénavant tournée, félicitations au peuple libyen à qui appartient maintenant d’écrire son Histoire en faisant attention aux rapaces qui rôdent autour de ses ressources naturelles.

samedi 8 octobre 2011

De la chute du régime



                La protestation populaire est toujours d’actualité au Maroc. Le mouvement du 20 février continue de mobiliser la population dans de nombreuses villes. La nouveauté provient de certaines nouveautés qui commencent à faire irruption, notamment avec le fameux slogan : «  le peuple veut la chute du régime ». Ce slogan a été scandé pour quelques secondes durant une marche à Tanger et dans une assemblée générale à Casablanca plus récemment.

                Huit mois se sont écoulés depuis la date du 20 février, huit mois durant lesquels le régime a tenté de calmer l’agitation avec de molles manœuvres dont le lifting constitutionnel, la libération de quelques prisonniers politiques et l’anticipation des élections législatives. Ces remaniements superficiels n’ont guère touché à l’essence des revendications : à la séparation des pouvoirs, à l’équité et à la garantie de la dignité du citoyen marocain.

                Revenons à notre fameux slogan. Dans l’alliage qui constitue le mouvement, certaines composantes visent plus que la monarchie parlementaire, c’est une vérité. Le premier manifeste du mouvement a d’ailleurs été modifié, et sa première requête a été façonnée pour exiger une ‘constitution démocratique émanant du peuple’ au lieu de ‘rééquilibrer les pouvoirs de la monarchie’. La première est vague et porte à plusieurs interprétations, tandis que la deuxième met en exergue la présence de la monarchie dans l’arène du pouvoir.

Cette ambigüité issue de piètres calculs politiques est d’ailleurs l’un des facteurs qui ont alimenté une certaine méfiance d’une partie des marocains à l’égard du mouvement. Le régime et sa propagande n’ont guère lésiné sur les moyens pour user de ce talon d’Achille. C’est ainsi qu’après huit mois, les calculs politiques commencent à s’essouffler et l’effervescence et l’excitation gagnent les rangs de certains.

Les individus qui se sont remarqués d’ailleurs par ce slogan ont commencé à clarifier ‘leurs intentions’ de mille et une façon. On a aussi lu les déclarations de certains militants du mouvement jouant habilement sur les mots afin d’écarter toute ‘mauvaise interprétation’ dise-t-on.

À ce stade de la lutte, la clarté s’impose. Une clarté à l’envers de nous-mêmes et à l’égard des citoyens marocains qui nous ont fait confiance. Si je fais partie du mouvement du 20 février, c’est pour instaurer une monarchie parlementaire, non pas pour déraciner les Alaouites du Maroc. La monarchie parlementaire constitue pour moi le compromis entre démocratie et régime monarchique. Au-delà de défendre la forme actuelle de la monarchie, j’y vois un garant de la stabilité et un frein au développement du pays. Elle doit garder la première fonction et délaisser la deuxième. Cette transition doit s’établir pacifiquement et sans engendrer d’instabilité sécuritaire au Maroc. Le mouvement du 20 février en est le meilleur outil jusqu’à présent.

Au sein du mouvement, on mène une lutte pacifique, on mobilise plusieurs villes simultanément et on s’attache à nos requêtes. Cependant, on n’a pas réussi à mobiliser le nombre souhaité des citoyens. Certains ont commencé à s’essouffler, et ce n’est pas en scandant ‘le peuple veut la chute du régime’ qu’on encouragera les autres franges à nous rejoindre.

L’heure de la clarté a sonné, la rédaction d’un nouveau manifeste fondateur et une perception plus réaliste de nos moyens et outils sont la clé du succès. L’effervescence révolutionnaire et les combines politiques ne nous mèneront pas loin face à un rude ennemi tel le makhzen.

dimanche 2 octobre 2011

Des trains et une grande vitesse.



                Le TGV commence à s’installer sur le territoire marocain. C'est dans ce dessein que Sarkozy nous a "honoré" lors de sa visite afin d’inaugurer le chantier de ce projet qui coutera la modeste somme de 33 MDH aux contribuables marocains. 33 MDH c’est le triple du budget de l’INDH et c’est presque le budget du ministère d’éducation nationale marocain, rien que cela.

                Délaissons le langage des chiffres et des sommes, et venons voir ce qu’il en est de cet immense chantier. Il est indéniable que la possession du TGV fournira une excellente image du Maroc à l’extérieur. Cependant, ce lifting mérite-t-il ce prix ? Qu’en est-il de l’image que porte le citoyen marocain à son pays et à la  gestion de son budget ? Se vanter de posséder le TGV est-il raisonnable dans un pays où l’analphabétisme et la précarité sont régents ? 

Si l’on regarde de près le marché conclu, on s’apercevra qu’aucun appel d’offre n’a été émis. La France était mécontente du  Maroc après l’affaire des avions Rafales, il fallait l'apaiser avec tous les moyens. C’est ainsi qu’une nécessité des plus urgentes se manifesta aux yeux de nos chers décideurs … On a tout, sauf le TGV ! Alstom vint alors nous poser un TGV tout neuf et on lui offrit le montant qu'elle exigeait, et puisque ce n’est que l’argent des marocains, nulle peine de négocier !

                Si l’on voulait développer le service offert par l’ONCF, on devrait commencer par couvrir tout le territoire marocain de ligne ferroviaire. Le sud marocain est complètement négligé. Souvenez-vous des promesses prononcées après la marche verte et du projet stagnant de relier Laâyoune au réseau ferroviaire. Au lieu de nous ramener un train qui roule à des centaines de kilomètres par heures, assurez-vous que ceux qu’on possède déjà arrivent à l’heure. Sérieusement, depuis quand avez-vous un train marocain qui arrive sans retard ? Sans parler de l’état piteux où se trouvent certains wagons destinés aux citoyens de 2ème classe … pardon, aux clients de 2ème classe.

                Dans un contexte économique mondial plus que serré, on emprunte encore et encore … Si seulement les emprunts servaient à combattre la précarité, à assurer un enseignement de qualité et un service de santé respectable. Il n’en est rien : on emprunte pour mettre sur rails un engin à grande vitesse afin d’assurer le confort et économiser le temps d’une élite qui pourra se procurer le prix du billet. Les précieuses minutes gagnées valent mieux qu’un citoyen éduqué et en bonne santé vous dis-je.

                De toute cette histoire, c’est la grande vitesse qui m’intrigue. La vitesse avec laquelle on dilapide l’argent du contribuable, la vitesse avec laquelle on court pour satisfaire les caprices de la France, la célérité d’adoption de ce projet et l’augmentation de son budget faramineux … Mais n’oublions guère que la précipitation et la vitesse augmentent considérablement le risque d’accident et de dérive …