Une énième
étude sur l’école publique est sortie. Le conseil supérieur de l’éducation, de
la formation et de la recherche scientifique a découvert que nos lycéens ont un
niveau catastrophique : 84% des scientifiques n’arrivent pas à la moyenne
en mathématiques, les littéraires éprouvent d’immenses difficultés avec l’arabe
et continuent de souffrir avec le français. 9 élèves sur 10 affirment quant à eux vouloir bénéficier
de cours particuliers. La conclusion est connue de tous : l’enseignement public
agonise.
Cette
situation est voulue, souhaitée et planifiée depuis des décennies. Le premier
indice qui permet de déceler cela est la stratification de l’enseignement :
Aux princes et princesses le collège royal où les camarades sont minutieusement
sélectionnés. C’est la future caste qui gouvernera le Maroc. Viennent ensuite
les établissements des « missions étrangères » où se succèdent les nantis
des grandes métropoles. La classe moyenne, ou ce qu’il en reste, lutte pour
intégrer sa progéniture dans des écoles privées qui ne cessent de pousser ici
et là. Merci à l’exonération fiscale et aux conditions avantageuses de ce secteur.
Arrive en dernière place l’école publique, l’école du makhzen, de la populace. Celle
où l’on met ses fils et filles parce qu’on n’a pas le choix. Celle où année
après année y réussir et y décrocher un bon diplôme devient un parcours du
combattant.
Mais même dans ces conditions là, lorsque
le statut de professeur ne jouit plus de l’aura de jadis, lorsque l’élève-enseignant
est tabassé et avec quarante élèves dans la classe, certains « fils du
peuple » arrivent à accéder au fameux ascenseur social. Mais ils se font de
plus en plus rares malheureusement …
À maintes
reprises a-t-on déclaré venir à la rescousse de notre éducation nationale.
Entre plans d’urgences, hauts conseils nommés, ministres qui se succèdent ou hautes
instructions royales, la situation ne fait qu’empirer. Chaque année les
chiffres deviennent plus alarmants. La grève des élèves enseignants ne date que
de quelques mois d’ailleurs … Faut-il s’étonner après si un marocain sur quatre
ayant entre 15 et 24 ans est au chômage et ne suit ni cours ni formation ?
Serait-on vraiment surpris si l’on est un des premiers pays exportateurs de terroristes
et de kamikazes de Daech ?
Dans un sujet
si critique, le gouvernement islamiste n’a pas lésiné sur les moyens pour
enfoncer le clou. Lahcen Daoudi voulait en finir avec la gratuité de l’enseignement
supérieur pour les « familles aisées » et Benkirane affirmait à voix
haute que l’État ne devrait plus s’occuper de l’éducation et que cette dernière
devrait être déléguée au secteur privé. Quelques années après ses déclarations
les études montrent qu’uniquement 2% des élèves de l’école publique sont issus de
milieux aisés. Il vaut mieux se taire parfois, surtout lorsqu’on ne gouverne
pas.
Il faudrait
être dupe pour croire à une volonté politique de réforme de l’enseignement. Ce
qu’on veut produire au Maroc c’est des sujets soumis et crédules prêts à être
galvanisés et transportés dans des camions pour crier « Vive le roi ». Ce qu’on veut c’est des petites mains ouvrières à exploiter dans les fermes et
les usines. Ce qu'on veut c’est une classe moyenne endettée, écervelée et nombriliste. Tout
ce beau monde sera gouverné par une caste qui pille les ressources de son pays et profite de son dur labeur. On lui jettera des miettes ou on l’embobinera
avec des politiciens qui ne cherchent qu’à pérenniser leur rente. Si dans son
livre phare Piketty affirmait que l’unique moyen pour rattraper le retard d’un
pays est la diffusion du savoir et l’éducation de son peuple, il a préféré ne
pas mentionner que dans le cas contraire, ce qu’on récolte, c’est une bombe à
retardement.
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